Le commerce transsaharien

image_pdfTélécharger
Logo Ad Fontes Realis

Le Sahara s’est formé entre le Vème et IIème millénaire avant notre ère. Cet espace a été à la fois une barrière entre le Nord et le Sud du continent africain et un lieu d’échanges. En effet, dès le IXème siècle avant J-C, les Phéniciens, les Grecs et les Romains établissent des échanges de part et d’autre de ce désert. Les Romains, en particulier, organisent, entre le Ier et le IVème siècle, des expéditions en direction des régions subsahariennes. Cependant, ces échanges ne connaissent leur réel essor qu’à partir du VIIIème de notre ère avec l’introduction, au IVème siècle, du dromadaire domestiqué en Arabie. Dès lors, plusieurs routes sont ouvertes entre les deux rives du Sahara. On peut distinguer à cet égard trois grands axes : une première route à l’est du Sahara qui connecte la région du lac Tchad à l’Egypte en passant soit par la région du Fezzan en Libye, soit en remontant le Nil ; une seconde connectant la boucle du Niger où se situe Tombouctou et Gao à l’Ifriqiya (actuelle Tunisie) et la Tripolitaine en Libye ; la dernière reliait les villes de Ghana et Aoudaghost plus à l’Ouest aux villes maghrébines de Tlemcen et Sijilmassa. Des empires tel que celui du Ghana, du Mali ou plus tard le sultanat Songhaï prospèrent à travers le contrôle de ces routes caravanières. En effet, l’existence d’Etats forts et stables au Nord autant qu’au Sud était une condition nécessaire pour pérenniser les échanges entre les deux rives du Sahara. Par ailleurs, ce désert était perçu comme un océan qui a donné son nom à sa région méridionale : le Sahel, qui signifie littéralement rivage en arabe. L’âge d’or du commerce transsaharien est situé entre le XIVème et le XVème siècle, date d’arrivée des Portugais sur la côte atlantique du Sahara qui annonce le déclin de ces échanges. Néanmoins, cela ne signe pas la fin des routes caravanières. Elles se maintiennent jusqu’au XIXème siècle, en particulier sur les routes orientales.

En adoptant une approche sur le long terme englobant une période qui s’étend du IXème au XXIème siècle, cet article reprend l’histoire de commerce transsaharien, et plus particulièrement la route occidentale, en mettant l’accent sur ses évolutions au fil des siècles. Ainsi, nous dégageons trois grands périodes pour structurer cette analyse : du IXème au XVème siècle, ensuite du XVème au XIXème siècle et enfin les XXème et XXIème siècles. Concernant la première période, nous aborderons les marchandises échangées et leurs enjeux. Par la suite, nous traiterons de l’importance du commerce transsaharien et son contrôle dans l’équilibre des forces au Soudan à travers l’exemple de Tombouctou. La seconde période verra l’adaptation de ce négoce à l’arrivée des Portugais sur les côtes atlantiques et ce par différents moyens. Enfin, durant le XXème la motorisation des transports permettra la réactivation des anciennes routes caravanières par des commerçants mais aussi les migrants.

Structure du commerce transsaharien jusqu’au XVème siècle

Des marchandises complémentaires

Le commerce transsaharien reposait sur des caravanes qui circulaient entre les villes du Maghreb : Sijilmassa (actuel Maroc), Tahert (Algérie) et Tripoli (Libye) ; et celles du Bilad al-Soudan (pays des noirs) : Aoudaghost (Mauritanie), Tombouctou et Gao (toutes deux au Mali). Sijilmassa, en particulier, était un carrefour stratégique par lequel transitaient les caravanes se dirigeant vers ou revenant du Sahara. En effet, elle se situe de 9 à 11 jours de marche de Fès ; 50 jours de Kairouan (actuelle Tunisie) et plus ou moins deux mois de Ghana et Toumbouctou. Les commerçants arabo-amazighs fournissaient du sel gemme extrait des salines du Sahara (Awlil, Taghaza), des produits manufacturés (bijoux, armes, poteries, tissus), des céréales, des chevaux, du bétail, des dattes et du laiton. En échange, ils achetaient de l’or, des esclaves, de la noix de cola, de l’ivoire, de la gomme arabique et des peaux d’oryx utilisées pour la fabrication de boucliers.1

L’or était particulièrement prisé par les royaumes du Maghreb car il était utilisé pour frapper la monnaie. Le port caravanier de Sijilmassa s’est même érigé au rang de centre de frappe de la monnaie durant le règne Fatimide à partir de 975.2 En outre, devoir recourir à la monnaie en cuivre était perçu comme un déclin économique. Dès les premières conquêtes arabes au Maghreb, les dirigeants musulmans mènent des expéditions plus au Sud à la recherche d’un pays d’or dont ils n’ont que des rumeurs. Par ailleurs, une partie de cet or est transportée en Europe où les dirigeants ont des préoccupations similaires. Rappelons que l’Europe chrétienne a longtemps partagé une frontière terrestre avec le monde musulman au niveau de la péninsule ibérique et que ces deux sphères entretenaient des échanges commerciaux. Il n’est donc pas étonnant de retrouver des perles vénitiennes dans les sites archéologiques de la vallée du fleuve Sénégal.3 Le commerce transsaharien connectait même le Soudan à une économie-monde avec des porcelaines chinoises retrouvées en Afrique subsaharienne. Si l’or était une ressource tant convoitée par les royaumes d’Afrique du Nord, qu’avaient ces derniers à offrir en contrepartie ? La principale monnaie d’échange était le sel. En effet, les royaumes du Soudan se situe dans une région pauvre en sel. Hormis le dessalement de l’eau de mer qui fournit du sel difficile à conserver et par extension à transporter, le pays de l’or n’a pas d’autres moyens de produire cet ingrédient clé de tout régime alimentaire. Il donne plus de goût aux aliments, permet de conserver la viande et d’engraisser le bétail. Or, justement, le Sahara, contrôlé par les Arabo-berbères, contenait des mines d’où ces derniers prélevaient le sel gemme, plus facile à transporter et disponible en plus grande quantité. Les deux rives du Sahara disposaient donc de biens complémentaires qui encourageaient par conséquent le développement et le maintien des échanges.

Le commerce transsaharien n’est pas aussi linéaire que l’on peut imaginer. Les marchandises récupérées à Gao ou Tombouctou ne sont pas les mêmes qui atteignent Sijilmassa ou Tlemcen et inversement. En effet, seuls l’or, le sel et les produits destinés aux noblesses des régions respectives traversaient le désert en entier. Par conséquent, les autres denrées telles que les céréales, le bétail et les dattes étaient écoulées le long du chemin dans les oasis et les villages traversés par les caravanes. Ces échanges étaient d’une grande importance pour les populations locales qui ne pouvaient produire lesdites denrées dans le désert.4

Les grands empires du Soudan

Par ailleurs, les échanges avec le Nord du Sahara ont contribué à l’épanouissement d’empires comme celui du Ghana (IVème – XIIIème siècle) qui s’étend sur un territoire à cheval sur la frontière actuelle du Mali et de la Mauritanie. Le Sultanat du Mali (1230 – vers 1600), puis le Sultanat songhaï (1464 – 1591), lui succèdent. Ces empires ont le monopole de la production d’or. Ils sont conscients de la valeur accordée par les royaumes arabo-berbères en Afrique du Nord et les Européens au métal précieux autour duquel ils maintiennent alors des mythes. Les commerçants arabes, n’ayant pas directement accès aux régions aurifères, croyaient que les réserves d’or étaient infinies et se renouvelaient chaque année. En outre, leurs politiques économiques étaient centrées sur cette ressource. Ainsi, quand ils avaient un excédent de production ils en baissaient le prix afin d’augmenter les importations, entre autres, de sel.

Si le commerce transsaharien a contribué à la prospérité de ces empires, il est primordial de ne pas le voir comme un catalyseur pour l’émergence de structure étatique complexe au Sud du Sahara. L’histoire de l’Afrique de l’Ouest a pu être appréhendée, à tort, dans un axe Nord-Sud en débutant par l’Afrique du Nord, ensuite le Sahara avant d’atteindre le Sahel.5 Cette même analyse présuppose que les empires du Soudan doivent leur richesse et leur grandeur au commerce transsaharien. Or, si les échanges ont pu rapidement se développer entre les deux rives du désert c’est grâce à l’existence de réseaux locaux déjà actifs au Sud. Ceux-ci exploitaient notamment les voies fluviales pour transporter des marchandises échangées plus tard dans un cadre international plus grand. Les caravanes se sont donc greffées à cette structure.

Étude de Tombouctou

Prenons l’exemple de Tombouctou. Cette « ville mystérieuse » aurait été fondée en 1100 par des Touareg selon le Tarikh al-Sudan (littéralement « Histoire du Soudan »), une chronique écrite par Abderrahman Es Sa’di relatant l’histoire des empires du Ghana, du Mali et des Songhaïs. Toutefois, des découvertes archéologiques dans le Delta Intérieur du Niger – partie du fleuve où ce dernier se subdivise en de nombreux bras – suggèrent un peuplement bien antérieur. Le fleuve Niger permettait des échanges sur de longues distances par voie de navigation fluviale. Ce réseau s’étendrait du Sénégal à l’actuel Nigéria, appuyant ainsi la thèse d’une intégration du commerce transsaharien à une structure préexistante.

Se situant sur la pointe de la boucle du Niger, Tombouctou jouissait d’une position stratégique qui lui a valu les convoitises des différents empires ayant régné sur la région. En effet, d’une part, sa proximité dudit fleuve rend les terres à la périphérie de la ville cultivables et la connecte à d’autres villes telles que Djenné à l’Ouest et Gao à l’Est. D’autre part, elle représente un port caravanier sur la rive sud du désert. D’abord un village indépendant où se retrouvaient les commerçants venant de différents territoires, Tombouctou aurait été une sorte de « ville franche » permettant d’échapper à la fiscalité de l’Empire du Ghana à l’Ouest et du Royaume de Gao, qui devient plus tard le Sultanat Songhaï, à l’Est. Avec le déclin de l’Empire de Ghana durant le XIIème siècle et par extension celui de la route menant au port caravanier d’Aoudaghost, à l’Est de Tombouctou, la ville mystérieuse gagne en importance. Elle est pacifiquement annexée, d’après le Tarikh al-Sudan, par Mansa Moussa, roi du Mali, lors de son voyage de retour après le pèlerinage à la Mecque qu’il effectue en 1324.

Après le XIVème siècle, le Sultanat du Mali connaît un déclin graduel caractérisé par un glissement de son centre de pouvoir à l’Ouest.6 En effet, au Nord, sa façade saharienne subit les attaques des Touaregs qui finissent par conquérir Tombouctou, Walata et Nema au XVème siècle. Ils privent ainsi le Mali d’une importante source de revenu. A cela s’ajoute la montée en puissance du Sultanat Songhaï, qui conquiert Djenne et Tombouctou en 1468, le Mali s’oriente plus vers ses territoires à l’Ouest. Là, il établit des relations commerciales avec les Portugais qui débarquent en Afrique dès la première moitié du XVème siècle. L’arrivée de nouvel acteur aura un impact majeur sur le commerce transsaharien que nous développons par la suite. Concernant le Mali, ce dernier développe des relations diplomatiques avec le Portugal sans que celles-ci soient concluantes. Les régions ouest de l’Empire font petit à petit sécession, privant le Mali de sa façade maritime. Enfin, notons que les tribus Fulbé (Peuls) Denianke montent également en puissance durant cette période et conquiert les territoires entre le cœur historique du Mali, la région du Mande, et ses provinces plus à l’Ouest. Leur poussée du Sud du fleuve Gambie vers le Nord en direction du fleuve Sénégal coupe l’empire pratiquement en deux en plus de fermer l’accès du Mali à la route transsaharienne plus à l’Ouest.

Le règne des Songhaï sur Tombouctou dure jusqu’en 1591 date à laquelle les Marocains envahissent l’Empire avec pour ambition de contrôler les routes caravanières dans un contexte de percée des puissances européennes dans le Sahara atlantique. On observe donc à travers l’exemple de Tombouctou l’intérêt que trouvent les royaumes au Sud autant qu’au Nord du désert à contrôler le commerce transsaharien.

Au côté des empires existent aussi des entités politiques formées de tribus amazighs. Celles-ci contrôlent les territoires plus au Nord, dans le Sahara, où elles nomadisent. Le Sahara ne permettant pas l’établissement de frontière tangibles, des points de contacts entre les territoires des tribus apparaissent au niveau des points d’eau. Les Amazighs réclamaient aux caravaniers un droit de passage à défaut duquel leur marchandise était saisie. Selon leurs allégeances, ils travaillaient également comme guides pour la traversée du désert qui prenait près de deux mois. Ainsi, les Sanhaja occupaient ce rôle au niveau des routes les plus occidentales reliant le Maroc au Soudan.

« La victoire de la caravelle sur la caravane »

A partir du XVème siècle, le Portugal et l’Espagne finissent de « mûrir les conditions technologiques et pré-capitalistiques qui leur permettront d’initier l’ouverture atlantique ». En effet, forte des progrès de la navigation (cartographie majorquine, invention de la boussole, de la voile, de la caravelle) et de l’esprit capitaliste de ses marchands, l’Europe réussit à contourner la Méditerranée « verrouillée » par les Ottomans et à « partir à la découverte des mers, des océans, des côtes, de l’Afrique, de l’Amérique et du monde ». Il est admis que « l’ouverture de l’Atlantique » a mené à la substitution du commerce transsaharien, et par extension la traite d’esclaves, par le commerce triangulaire reliant l’Europe, l’Afrique et l’Amérique. Vittorino Magalhães Godinho, avec son Economie de l’Empire portugais aux XVe et XVIe siècles, résume ce phénomène en une phrase : « la victoire de la caravelle sur la caravane ». La partie suivante repose en grande partie sur le travail d’Idrissa Ba dans son article intitulé : « Le commerce transsaharien et ses logiques d’accommodation par rapport au commerce transatlantique entre le XVe et le XIXe siècle ».

Plutôt que de disparaître au profit des nouvelles routes atlantiques, le commerce transsaharien s’adapte à travers plusieurs méthodes et notamment la superposition des deux commerces. En effet, les caravanes continuent d’acheminer des produits essentiels tels que les dates des oasis sahariennes vendues plus au Sud. Les céréales, dont le mil qui est un ingrédient important du régime sahélien, sont échangés entre la vallée du fleuve Sénégal et le Sahara occidental. En outre, le sel gemme est une denrée prisée au Sahel pour sa rareté dans la région et ses bienfaits sur la santé. Sans oublier l’or qui emprunte encore au XVIème siècle les routes sahariennes en direction du Maroc malgré l’attractivité croissante de la côte atlantique.

L’arrivée des Portugais dans le Sahara atlantique, notamment à Arguin (en actuelle Mauritanie) qui devient comptoir fortifié en 1461, détourne les caravanes vers la côte. Plusieurs raisons peuvent être évoquées. D’une part, les marchands européens proposent de nouveaux produits de consommations qui sont, en partie, acheminés de l’Afrique du Nord à la côte atlantique. Parmi ces marchandises, citons « les chevaux, les armes à feu, les alcools, les parures, les burnous, les djellabas, les haïks, les tapis, les scelles, les étriers, les bassines en cuivre, les cuvettes, les chaudrons, les pots à urine, les tissus, les doups, des anneaux, les bracelets ou bassins de cuivre, du blé ». D’autre part, on enregistre une forte demande en esclaves du côté européen. Cette main d’œuvre est alors transportée de la côte ouest-africaine vers la péninsule ibérique et ses îles à sucre, et plus tard, vers l’Amérique.

Il est certain que le commerce transsaharien n’a pas pu retrouver son âge d’or des XVème et XVIème siècles en raison de l’ouverture de ce marché à de nouveaux acteurs. Pour autant, il n’a pas disparu comme nous l’avons vu et subsiste à ce jour dans une moindre importance. En effet, il faut garder à l’esprit que le commerce transsaharien repose avant tout sur un réseau reliant des oasis et villages reculés où les populations dépendent des caravanes pour l’acheminement de denrées autrement impossibles à produire.

Les routes sahariennes au XXIème siècle

La motorisation des transports a permis de couvrir de plus grandes distances en un temps plus courts. Ces nouveaux moyens de locomotion sont très vite introduit à la région et la première voiture ayant traversé le Sahara de l’Algérie au Niger en 1922. L’article « Circulations marchandes au Sahara : entre licite et illicite » rédigé par Judith Scheele explique les modalités de réactivation de ce commerce depuis les indépendances.

Avec l’introduction de nouveaux moyens de transports, des acteurs qui ont su profiter du contexte géopolitique mondial (Seconde Guerre mondial et indépendances) ont construit de réels monopoles de ce commerce.7 En effet, après 1945, un commerce illicite se développe dans un axe Sud-Nord entre le golfe de Guinée (Nigéria) et l’Algérie en raison du manque d’approvisionnement en denrées alimentaires. Plus tard, durant les années 1970, cette tendance s’inverse notamment suite aux violentes sécheresses qui sévissent au Sahel. La subvention par l’État algérien de denrées de base telles que « la semoule, les pâtes alimentaires, les biscuits, l’huile et le lait en poudre » est une occasion en or pour les marchands algériens. Par ailleurs, la marque de lait en poudre algérienne « Lahda » a donné son nom à ce trafic surnommé « fraude lahda ». Si la fraude lahda était illégale, elle n’était pas pour autant interdite dans les faits. Elle reposait même sur la complicité des agents d’États. Petit à petit, du ciment, du fer à béton, de l’électroménager et des pièces de rechange automobiles étaient désormais chargés au côté des denrées alimentaires. Ces marchandises étaient transportées en camions vers les marchés de Gao, de Tombouctou au Mali et d’Agadez au Niger. A ces produits, s’ajoutent des cigarettes acheminées en Libye depuis le Niger. En outre, ce commerce s’étend également au bétail qui fait l’objet d’un monopole de la part des marchands arabes. Ces derniers avaient les moyens financiers d’engraisser les chameaux et de les acheminer vers les marchés du Nord.

Même s’il est marginal dans l’ensemble des échanges, le trafic de drogues, d’armes et de voitures volées est une composante importante de ce renouveau du commerce transsaharien. Les drogues, en particulier, sont depuis longtemps commercialisées le long des frontières marocaines. Toutefois, une nouvelle route reliant l’Amérique latine exportatrice de stupéfiants et le Sahara émerge. Ces produits sont acheminés en Mauritanie ou au Mali d’où ils longent ensuite le Sahara pour enfin arriver en Europe de l’Est. Ces réseaux reposent en partie sur des groupes terroristes installés au Nord du Mali où ils escortent et protègent les fraudeurs moyennant un rétribution qu’ils réinvestissent en armements.

Enfin, les routes sahariennes subsistent à travers les périples qu’entreprennent les migrants d’Afrique de l’Ouest se dirigeant vers l’Afrique du Nord ou l’Europe. Les routes empruntées reprennent des stations clés du commerce transsaharien telles que Tombouctou et Kano. Néanmoins, elles intègrent également de nouvelles villes qui n’en faisaient pas partie au Moyen-Age. On peut citer à cet égard Arlit à partir de laquelle les migrants, à bord de pick-up ou de camions, se dirigent vers la frontière algérienne.8 Par ailleurs, ces trajets impliquent des arrêts plus longs qui peuvent durer des mois. En effet, les migrants s’arrêtent, par exemple, à Agadez, au Niger, où ils doivent souvent attendre le départ d’un convoi en direction de la Libye – ces convois ne sont organisés que deux fois par mois- ou bien économiser le montant nécessaire pour payer la traversée du désert. Selon l’Organisation internationale pour les migrations, en 2023, 158 000 migrants seraient arrivés en Europe (en Italie et à Malte) en empruntant ces routes9. A noter que ces migrants sont souvent victimes de traite d’êtres humains, notamment en Libye.

Notes

  1. Tiphaine de Rocquigny (Productrice). (2023, 04 septembre). « Au Sahara, le commerce médiéval à dos de dromadaire » (Episode 1/3) [Épisode de podcast audio]. Dans « L’économie dans le désert ». France Culture. URL : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/au-sahara-le-commerce-medieval-a-dos-de-chameau-6243351 ↩︎
  2. Unesco. International Scientific Committee For The Drafting Of A General History Of Africa. (1992). UNESCO General History of Africa, Vol. III, Abridged Edition : Africa from the Seventh to the Eleventh Century. Univ of California Press. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000134376 Chapitre 14 « Trade and trade routes in West Africa » de ce volume ↩︎
  3. Ba, Idrissa. « Le commerce transsaharien et ses logiques d’accommodation par rapport au commerce transatlantique entre le XVe et le XIXe siècle. » Varia Historia 36 (2020): 329-360. DOI : https://doi.org/10.1590/0104-87752020000200004 ↩︎
  4. SCHEELE Judith, « Circulations marchandes au Sahara : entre licite et illicite », Hérodote, 2011/3 (n° 142), p. 143-162. DOI : 10.3917/her.142.0143. URL : https://www.cairn.info/revue-herodote-2011-3-page-143.htm ↩︎
  5. Saad, E. N. (1983). Social History of Timbuktu : The Role of Muslim Scholars and Notables 1400-1900. Cambridge University Press. https://books.google.fr/books?id=nAsWQqy_fXwC&pg=PA22&hl=fr&source=gbs_toc_r&cad=2#v=onepage&q&f=false ↩︎
  6. Unesco International Scientific Committee For The Drafting Of A General History Of Africa. (1998). UNESCO General History of Africa, Vol. IV, Abridged Edition : Africa from the Twelfth to the Sixteenth Century. Univ of California Press. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000134377 . Chapitre 7 « The Decline of the Empire of Mali : the Fifteenth to Sixteenth Centuries » de ce volume ↩︎
  7. Scheele, op.cit. ↩︎
  8. Apard-Malah, E. (2012). Voies commerciales et routes de l’exode : évolution des pratiques de voyage au Niger. Diasporas, 20, 149 162. https://doi.org/10.4000/diasporas.3086 ↩︎
  9. International Organization for Migration (IOM), Feb 23 2024. DTM Afrique de l’ouest et du centre — Cartographie régionale des mobilités (Décembre 2023). IOM, West and Central Africa. URL : https://dtm.iom.int/fr/reports/afrique-de-louest-et-du-centre-cartographie-regionale-des-mobilites-decembre-2023 ↩︎

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut