L’Eurodrone est initialement une proposition lancée par Airbus Defense et Space, Dassault Aviation et Leonardo en 2013. Le projet a pour but d’équiper l’Europe de drone de type MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) ou autrement dénommé EuroDrone ou encore MALE RPAS. Ce projet, initialement, aurait pu se concrétiser en 2019, mais faute d’un accord entre les quatre pays clients (Allemagne, Espagne, France et l’Italie) et les industries fabricante de l’Eurodrone, le projet est reporté. Ce programme est conduit aux cours de la Loi de programmation militaire 2019-2025 et 2024-2030 Françaises. Le Conseil européen fixe plusieurs objectifs pour le programme tel que l’autonomie stratégique européenne, mais aussi la souveraineté économique européenne. La France, au sein de ça LPM 2024-2030 prévoit l’acquisition de 4 systèmes de drones comprenant trois vecteurs aériens et deux systèmes en option1.
Dimensions et poids
- Longueur : 17 mètres
- Envergure : 30 mètres
- Hauteur : 5 mètres
- Poids maximal au décollage : 11 t
- Capacité de charge utile : 2300 kg
Performances et propulsion
- Vitesse de croisière : 270 nœuds (500km/h)
- Vitesse maximale : 270 nœuds (500km/h)
- Endurance : 18-40 heures
- Plafond de service : 13 700 mètres (45 000)
Système de propulsion
- Type de moteur : Turbopropulseurs General Electric Catalyst en configuration propulsive (moteurs en configuration « pusher », c’est-à-dire montés à l’arrière de l’aile et poussant l’avion)
- Moteur : Le moteur Catalyst est un turbopropulseur, ce qui veut dire qu’au lieu d’utiliser un moteur avec des cylindres, il utilise une turbine qui entraîne une hélice, au lieu de pistons pour générer de la puissance.
- Puissance : Pas encore de donnée spécifique, mais selon les sources l’Eurodrone sera doté d’au minimum 1300 chevaux pour chaque moteur, cela pourra monter à 1600
Caractéristiques avancées
- Design modulaire : Permet des capacités multi-missions incluant les missions d’Intelligence, Surveillance, Acquisition de Cibles et Reconnaissance (ISTAR)
- Souveraineté européenne et autonomie stratégique européenne : Conçu sans dépendance à la réglementation ITAR, utilisant des technologies européennes à presque 100%
- Déplacement : Décollage et atterrissage autonomes
- Flexibilité opérationnelle : Conçu pour une intégration dans l’espace aérien non ségrégué
- Performances stratégiques : Capable de missions de longue endurance avec des armes de précision
- Type de capteur : Capteurs européens hautes performances (visible/infrarouge, radar air-sol, AIS [surveillance du trafic maritime], PLS [localisation combattant isoler])
- Systèmes de navigation par satellite : Système de navigation GPS et GALILEO2
- Haut niveau de connectivité : liaisons à vue directe et par satellite, haut débit et bas débit, relais de communication, diffusion vers terminaux vidéo distants, liaisons de données tactiques L16
- Capacité d’armement : Capacité missile et bombes guidées
Capacités
Fin février, Airbus, Dassault et Leonardo, en collaboration avec l’OCCAR (Organisation Conjointe de Coopération en Matière d’Armement), ont officiellement lancé le programme Eurodrone, qui vise à développer un drone de moyenne altitude et de longue endurance (MALE). Cette initiative a vu le jour après que de nombreux projets de drones ont échoué en raison d’un manque de volonté politique. Cependant, en 2015, la France, l’Allemagne et l’Italie ont annoncé leur intention de développer un drone commun et ont présenté un modèle au salon aéronautique de Berlin en 2018. Le nom commercial du drone est « Eurodrone », avec une commande initiale de 60 unités, assurant une ligne de production solide. L’Eurodrone sera un élément central du système aérien de combat futur (FCAS) et fournira des capacités ISTAR (renseignement, surveillance, acquisition d’objectifs et reconnaissance). Il sera équipé de capteurs électroniques pour les opérations diurnes et nocturnes, d’un radar à balayage électronique actif (AESA) et d’un radar à ouverture synthétique (SAR). En outre, il sera doté de capteurs de guerre électronique et sera capable de déployer des bombes à guidage laser et infrarouge.
Bénéficiant des programmes précédents, l’Eurodrone intègre des turbopropulseurs à poussoir similaires à ceux du drone Telemos, ainsi qu’une soute modulaire à l’image du drone Talarion. Cette soute pourra accueillir un radar de patrouille maritime de 80 kg, ce qui lui permettra d’effectuer des missions de patrouille maritime. La conception modulaire offre également une grande sécurité pour l’avenir, en permettant l’intégration de nouvelles technologies sur une période de temps étendue. L’Eurodrone aura une masse maximale au décollage de 11,5 tonnes, ce qui le rend deux fois plus grand que le drone Reaper et nettement plus grand que le TB2 turc. Il aura une autonomie de 29 heures en mode ISR et de 18 heures en mode armé, soit 4 heures de plus que le Reaper. Des systèmes de navigation de précision lui permettront de s’intégrer dans le trafic aérien civil, évitant ainsi les détours par l’espace aérien réservé aux militaires.
L’un des principaux avantages de l’Eurodrone reste son statut « ITAR-free », c’est-à-dire qu’il ne contient aucun composant américain, ce qui permet de contourner les restrictions à l’exportation imposées par les États-Unis. Cette indépendance demeure cruciale pour la souveraineté de l’Europe en matière de défense et pour sa compétitivité commerciale. Le budget du programme est de 20 milliards d’euros pour 20 systèmes, chacun composé de trois drones, les achats ultérieurs devant être moins coûteux. Alors qu’un Reaper coûte environ 15 millions de dollars, l’Eurodrone devrait se situer dans une fourchette de prix similaire.
Armement
- Points d’attache : 4 points d’attache pour divers équipements de mission et d’armement
- Munitions et armement intégré : Missile air-sol Haut de Trame (MHT) en complément des bombes GBU-49 [de 225 kg, ndlr]
Dates clés
- 18 mai 2015 : décision prise par les trois ministres de la Défense français, allemand et italien de conduire une étude d’une durée de deux ans (dans une déclaration d’intention commune, les ministres annoncent leur volonté de « conduire une étude de définition afin de préparer la phase de développement d’un drone MALE européen »)
- Août 2016 : signature du contrat des études de définition
- 26 avril 2018 : à l’occasion du Salon aéronautique international de Berlin (ILA), dévoilement de la maquette du drone
- 24 février 2022 : signature du contrat entre l’Organisation conjointe de coopération en matière d’armement (OCCAr) et Airbus
- 2027 : Premier vol du prototype
- 2027 au-delàs : Capacité opérationnelle complète3
Interventions et engagements des Eurodrone
Aujourd’hui, l’Europe n’a évidemment aucune souveraineté dans le domaine des drones MALE. L’objectif du programme Eurodrone est de fournir des capacités opérationnelles aux armées qui en font la demande. Actuellement, la plupart des drones utilisés par les armées européennes sont fabriqués à l’étranger et l’utilisation de ces drones entraîne souvent des restrictions de souveraineté extrêmement intrusives, comme les drones américains MQ-9 Reaper qui sont en service dans de nombreuses armées européennes. C’est pourquoi l’Europe tente de développer et de produire ses propres drones MALE depuis plus de vingt ans, mais ces tentatives se sont jusqu’à présent soldées par des échecs. Le programme Eurodrone est une nouvelle tentative, et son développement est actuellement suivi de près par toutes les nations, qui espèrent qu’il sera couronné de succès. Le développement, la production et les perspectives d’exportation de ce programme ne sont pas sans risques. L’un d’entre eux est que les États-Unis pourraient utiliser la réglementation ITAR (International Traffic in Arms Regulations) pour retarder le programme jusqu’à ce que les entreprises européennes aient redessiné les composants « ITARisés ». Cela pourrait permettre aux États-Unis de retarder l’entrée d’Eurodrone sur le marché de l’armement afin de favoriser la concurrence pour leurs propres équipements sur le marché de l’exportation d’armes. En outre, l’influence américaine en Europe est actuellement très forte et de nombreux pays européens ont récemment effectué des achats importants d’armes américaines.
Actuellement, la politique étrangère et de sécurité des États-Unis semble s’orienter vers la région indo-pacifique, une tendance qui devrait se poursuivre jusqu’à la fin des années 2030. Cette évolution conduira l’Europe à reconnaître la nécessité d’une réelle autonomie stratégique en matière de défense pour faire face aux menaces potentielles, malgré le risque prévisible d’affaiblissement du « parapluie de l’OTAN ». Dans ce contexte, la base industrielle de défense européenne (BITD-E) doit être renforcée par le développement du mécanisme européen de défense (EDM), en particulier par le Fonds européen de défense (FED) pour soutenir les grands projets d’armement européens. Le programme Eurodrone est donc développé dans un contexte géopolitique complexe, incluant la guerre en Ukraine et ses implications, notamment la relance de l’OTAN et l’influence accrue des États-Unis dans l’arène militaire européenne.
Le développement de la défense européenne nécessite un soutien politique fort. L’adoption des orientations stratégiques par les 27 États membres de l’UE en mars 2022 a jeté les bases d’une réflexion sur une stratégie de défense commune et soutient explicitement le développement de la défense européenne. Cependant, les pays restent souverains en matière de défense et sont libres de conclure des accords bilatéraux avec n’importe quel pays, comme l’illustre l’accord de Lancaster House de 2010, qui a relancé la coopération franco-britannique mais a affaibli les projets de drones MALE Talarion et Telemos alors en cours de développement. Dans ce contexte, le programme Eurodrone apportera un soutien efficace et flexible aux pays européens souhaitant atteindre l’autonomie dans le domaine des drones MALE. Le programme contribuera également au développement de la défense européenne grâce au développement de la base industrielle européenne de défense (BITD-E) et aux subventions accordées par la Commission européenne. Le programme étant actuellement en bonne voie, il est raisonnable de penser que l’Europe pourra capitaliser sur ce succès et développer d’autres projets européens, dont on espère qu’ils seront également couronnés de succès.
Ilya Davidoff, chargé de veille en progrès technique militaire
Bibliographie
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- CLERMONT Bruno ; général de l’AAE ; auditionné par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat ; le 7 décembre 2022
- GOYA Michel ; colonel ; auditionné par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat ; le 2 novembre 2022
- LECORNU Sébastien ; ministre des Armées ; auditionné par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat ; le 20 juillet 2022
- LECORNU Sébastien ; ministre des Armées ; auditionné par la commission de défense de l’Assemblée nationale ; le 7 juillet 2022
- UNI Assaf, Germany wants Israeli UAVs to thwart Russian strikes, Globes, 23 October 2022
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- ZUBELDIA Océane, Histoire des drones : de 1914 à nos jours, Paris, Librairie Académique Perrin, 2012, p. 238
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- Ministère des Armées. (s.d.). Fiche LPM – Eurodrone. Ministère des Armées.
- Pascal, Alexandre. (2022-2023). L’Eurodrone, un programme de souveraineté dans le domaine de la défense ? (Mémoire de Master 1, sous la direction de Monsieur Amaël CATTARUZZA). Université française de géopolitique Paris 8.
Notes
- Ministère des Armées. (2021). Fiche LPM – Eurodrone. Site web du ministère des Armées. https://www.defense.gouv.fr/sites/default/files/ministere-armees/Fiche%20LPM%20-%20Eurodrone.pdf ↩︎
- Ministère des Armées. (2021). Fiche LPM – Eurodrone. Site web du ministère des Armées. https://www.defense.gouv.fr/sites/default/files/ministere-armees/Fiche%20LPM%20-%20Eurodrone.pdf ↩︎
- Ministère des Armées. (2021). Fiche LPM – Eurodrone. Site web du ministère des Armées. https://www.defense.gouv.fr/sites/default/files/ministere-armees/Fiche%20LPM%20-%20Eurodrone.pdf ↩︎